LES PRINCIPAUX PRODUCTEURS FRANÇAIS
DE CARTES D’IMAGES STÉRÉOSCOPIQUES

Résumé de ce que les divers documents et matériels détenus, ou mentionnés sur Internet à travers les messages de la liste “ Images Stéréo ”, ont permis de mettre au jour sur les marques en général

Préambule

      Nous avions remarqué la similitude de beaucoup de noms de cartes entre les catalogues BRUGUIERE et LESTRADE ; d’autres internautes ont fait ce même constat. Un membre de la liste Images-Stéréo a posé la question d’un lien éventuel entre ces deux sociétés ; un autre cite le nom des acteurs qu’il trouve sur la série ‘Napoléon’ de Sacha Guitry en StéréoColor de BRUGUIERE ; nous confirmons qu’ils se révèlent être les mêmes que ceux de la carte LESTRADE ‘Napoléon’. Par ailleurs, nous possédons une carte COLORELIEF portant la mention ‘Photos G. BRUGUIERE’. Nous pouvons remercier René LE MENN (membre du Stéréo-Club Français) qui, par une réponse précise sur la liste Images-Stéréo, va transformer en certitude ce que nous supposions plausible : il nous signale que, dans son mémoire d’études (1997) à l’Ecole Nationale Supérieure LOUIS LUMIERE, Séverine VASSELIN informe de la nature exacte des liens entre COLORELIEF, BRUGUIERE et LESTRADE.
      Fort de cette certitude, nous proposons donc ce résumé sur ‘Les Producteurs Français de Cartes d'Images Stéréoscopiques’, résumé qui reste certainement incomplet. A ce résumé nous avons ajouté des informations complémentaires données par René LE MENN, P.F. BERGER et G. METRON (tous trois membres du Stéréo-Club Français).

COLORELIEF, BRUGUIERE et LESTRADE

      Avant 1965, COLORELIEF diffusait ses stéréoscopes (Rétro et un modèle noir en bakélite) et des cartes stéréoscopiques sur les curiosités et merveilles du monde. D'une façon générale, chaque carte proposait 8 couples stéréoscopiques de diapos 12 x 12 mm réalisés sur deux bandes de film 16 mm. Deux formats au moins de carte sont connus : 9 x 13,5 cm et 9 x 17 cm. Aucune adresse n'existe sur les cartes diffusées ; et si le grand format précise ‘L'Expansion Photographique - Paris’, une publicité de 1955 de cette marque mentionne ‘Editions COLORELIEF - 10 Rue Chaubat - Paris 9è’. La pochette du petit format évoque des listes complètes et détaillées, et celle du grand format précise ’Colorelief vous présente 800 cartes sélectionnées’. Mais la production doit être plus grande puisque certaines cartes de petit format sont numérotées au moins jusqu’à 1020 ( ?), et que certaines cartes de grand format présentent une double numérotation jusqu’à “ 4.627 (735) ” (?). Ceci laisse supposer des rééditions des cartes précédentes. COLORELIEF était présent à la ‘Biennale de la Photo et du Cinéma’ (Galerie du Paddock, Stand 2) en 1955 ou 56. On peut signaler l’existence de cartes de nus artistiques. Aucun appareil photo spécifique n'a été commercialisé.

      BRUGUIERE est très présent depuis les années 40-50 en France, surtout avec ses stéréoscopes (son modèle n°1, ses Stéréoclic n°10, Super et Junior, le Lucirex et le StéréoColor), et ses cartes stéréo pour enfants. En 1965, Georges BRUGUIERE rachètera un de ses concurrents, COLORELIEF, ce qui lui permit de rattraper son retard en matière de photographie couleur. Il était en effet l'un des derniers à adopter cette avancée technique. BRUGUIERE, qui produisait des séries de Stéréopositifs en noir-sépia sur verres 45 x 107 mm, en boîtes non numérotés contenant 12 couples 40 x 40 mm sur plaque de verre, diffusait ensuite les mêmes séries dites Stéréofilms, en noir et blanc, boîtes non numérotées au départ, puis ensuite avec nos inférieurs à 1202 (?), couples sur plan-film, protégé chacun par un plastique transparent. Une ébauche de StéréoColor apparaîtra dès 1950 mais ne durera pas : ce sont des boîtes de 3 cadres-barrettes plastiques 44 x 140 mm, avec chacun 4 couples de diapos 11 x 18 mm, et leur stéréoscope où le déplacement de la barette était horizontal ; au final, ces séries amèneront aux Stéréocartes en couleurs, n°s 1600 à 4871 (en janvier 1965), avec 8 couples de diapos 12 x 12 mm dans une carte au format 9 x 17 cm (à partir du rachat de COLORELIEF ?). Par la suite on retrouvera à nouveau des séries StéréoColors, n°s de 5001 à 7684 (?), boîtes contenant cette fois-ci 6 couples de diapos couleurs 24 x 24 mm sous cadre plastique 45 x 107 mm. En plus des catalogues normaux, il a existé de petits catalogues pour la jeunesse. On peut signaler aussi l’existence de cartes de nus artistiques dont un petit catalogue nommé pudiquement ‘Art et Nature’ signalera naturellement en sa page de garde que ces cartes ne sont pas destinés aux enfants. L'adresse des ateliers et studios de Georges BRUGUIERE, square Trudaine, puis 29 rue Belgrand et, en 1956, 74 rue d’Aubervilliers, à Paris ne figure pas sur les produits, dont le principal distributeur fut Diafrance, 37 rue Chanzy. Lacune bizarre, car les listings présentent une colonne en attente de "coches" ou de "nombres" pour commander les cartes souhaitées. Ces listes étaient certainement à déposer chez un revendeur BRUGUIERE. A l'erreur du retard évoqué plus haut s’en ajouteront d'autres relatives à la stratégie commerciale de l'entreprise et aux choix inadaptés de Georges BRUGUIERE et elles auront raison de la maison : cette dernière sera rachetée par son concurrent direct LESTRADE en 1974. Aucun appareil photo spécifique n’a été commercialisé.

LESTRADE est présent depuis au moins 1954, date du 1er catalogue que nous possédons : il s’agit d’un demi format (A5, soit 21 x 15 cm), qui mentionne 75 cartes. Les stéréoscopes LESTRADE (Simplex (colorés), Suprex et S 2000 pliant) permettent d'observer des cartes de 10 couples de diapos 14 x 12 mm. Ces cartes sont au format 10 x 17,3 cm (en 1954) et 10 x 19 cm (aujourd’hui) . Jusqu’à début 1967, le catalogue, remis à jour plusieurs fois par an (ce qui est vérifié pour 1954 67, 68) et exploi-tant le recto-verso, va voir son format s’agrandir progressivement du demi-format jusqu’au 21 x 55,5 cm. En fin 1967, y ajoutant des séries de diapos monoscopiques, LESTRADE modifie la forme de son catalogue : il devient un petit livret de 18 x 11 cm, et c’est maintenant le nombre de pages qui va évoluer. Les dernières pages intérieures et les deux faces de la couverture arrière vont accueillir des photos des visionneuses (stéréo et monoscopiques) et des projecteurs (monoscopiques). Tous les catalogues ne mentionnent pas leur date de publication, mais les informations du “ Vient de Paraître ” permettent de les classer entre eux. 75 cartes commercialisées en 1954, nous en trouvons 425 en 1958, 1366 en 1964, 2400 environ dans les années 80, puis 2800 mentionnées au catalogue des années début 90 . Les catalogues, surtout destinées à la jeunesse au départ, ne mentionneront jamais des séries de photos de nus qui se retrouvent dénommées “ Etudes de Plastiques ” sur les cartes correspondantes. On peut noter que LESTRADE, sans numérotation générale jusqu’en 1958 (?), va opter pour une numérotation 1 à ‘NNNN’ jusqu’au début des années 90, avec un classement par régions-thèmes-pays-séries enfantines. Il adoptera ensuite une numérotation ‘n°département-NNN’ , avec un classement par département-pays-séries enfantines. Au fil des années, nous pouvons constater régulièrement des ajouts, et occasionnellement des dédoublements, changements de n° ou de nom, disparitions de cartes. Au début, ces cartes stéréoscopiques ont été commercialisées par ‘‘Stéréoscopes LESTRADE’’. A partir de 1967 (c'est-à-dire l'année d'apparition dans le catalogue de séries de diapositives monoscopiques), ce sera par ‘‘SODILEST S.A’’. (SOciété de DIffusion LESTrade (?) ). Puis dans les années 90 par ‘‘LESTRADE’’ - 10 Ave des Acacias - 65500 Vic-en Bigorre, toujours. Aujourd'hui, les cartes portent encore le logo de LESTRADE, mais le fabricant en est la société MSM, basée comme LESTRADE à Vic-en-Bigorre (65500), si l'on en croit le copyright des nouvelles cartes commercialisées. Malheureusement, seules les cartes correspondant à des sites touristiques particuliers continuent d’être éditées. Jusqu'en 2000 environ, une mention précisait que les vues étaient faites sur [Film] Kodachrome. Comme pour COLORELIEF et BRUGUIERE, aucun appareil photo spécifique n'a été commercialisé.

AUTRES PRODUCTEURS : ROMO, ROLLAND

      Il semble que la date de création de RoMo soit entre 1955 et 1957, Ses stéréoscopes s'appellaient La Stéréochromie standard; puis RoMo Star, RoMo Standard, Vick et Junior. Différents catalogues de cartes et matériels ont existé, et sur celui de 1962-63, on peut voir que les thèmes généraux étaient Arts, Sciences, Histoire, Géographie et Tourisme ; les cartes stéréoscopiques étaient plutôt destinées aux écoles : au moins un de ses catalogues d'avant 1962 possède la mention ‘Agréé par le Ministère de l'Education Nationale’ et précise déjà que les cartes étaient publiées aussi en anglais. Mais là aussi, on peut signaler l’existence de cartes de nus artistiques non listés. Chaque carte au format 9,5 x 24,5 cm proposait 12 couples stéréoscopiques couleurs de 11 x 11 mm. Les parties libres du dos de la carte portaient des commentaires en français et en anglais sur le sujet traité. En 1962, nous trouvons pour adresse ‘ROMO’, 4bis rue du Bouloi - Paris 1er’, et pour la Belgique et le Bénélux ‘Ets Vanderveldes S.A., 36 rue de la Pépinière - Bruxelles’. Ce nom ‘ROMO’ est un raccourci de l'identité de son créateur, "Ro"bert "MO"UZILLAT.

      La production publique en 1962-63 était exactement de 500 cartes, mais des séries à la demande du ‘Secrétariat d'Etat à la Jeunesse et aux Sports’ ont existé en plus et accompagnées d'une boîte particulière et d'un stéréoscope. Bien que produites par RoMo, ces cartes particulières devaient être commandées à l' ‘Institut National des Sports - Service Photo-Cinéma - 11 Av. du Tremblay - Paris XIIe - Tél. DAU 29-17’. Sur ces dernières cartes uniquement, une mention précise ‘Film Kodak’.

Aucun appareil photo spécifique n'a été commercialisé, mais nous savons aujourd'hui qu'il existait un appareil de prise de vues stéréoscopique mis au point par R. Mouzillat lui-même.

      Les EDITIONS ROLLAND - 51 boulevard Saint-Martin, Paris 3ème, sont des producteurs français de couples stéréoscopiques sur lesquels nous n’avons pas beaucoup d’éléments. ROLLAND fabriquait des ‘Sterollfilms’ : couple noir et blanc de diapos 44 x 50 mm sur plan-film positif 45 x 107 mm tons chauds ‘Guilleminot’. Ses boîtes, qui contiennent 12 couples, présentent la mention ‘Musées-Voyages-Souvenirs’. Le thème général reste le Tourisme. Il a existé un stéréoscope ROLLAND, mais ces documents stéréos pouvaient être observés avec les stéréoscopes d'autres marques pour plaques 45x107 mm.

POUR GARDER UN PEU DE MAGIE A L'ANCIENNE...

      En plus de l'observation stéréoscopique, LESTRADE, BRUGUIERE et ROMO ont voulu maintenir à leur façon le côté ludique de ce que l'on avait appelé depuis quelques siècles la ‘lanterne magique’. BRUGUIERE avec ses Lumiclic et Lucirex, LESTRADE avec ses Projex et Projex Junior, et ROMO avec son RoMoFix ont donc produit des projecteurs monoscopiques dans lesquels on ne restituait qu'une des vues de chaque couple. On passait à la vue suivante en faisant descendre la carte soit avec une molette à friction, soit avec un mécanisme utilisant la fente présente entre deux couples consécutifs, soit à la main.

      Le Lucirex de BRUGUIERE est particulier, car il pouvait jouer deux rôles : soit stéréoscope avec lumière par l'arrière des vues stéréoscopiques ; soit projecteur mono si sa lumière était canalisée juste derrière un seul objectif de l'appareil. La lampe qui l'équipait pouvait être alimentée soit par deux piles plates de 4,5 V, soit par un transformateur branché sur le secteur.

Le RoMoFix de ROMO devait être posé en bordure de table pour permettre le transit de la Carte. Ce projecteur, certainement destiné à l'utilisation dans les écoles, devait être branché sur le secteur. LESTRADE est le seul a avoir produit un écran cartonné. Cet élément, très décoré avec des personnages de Walt Disney et autres séries enfantines, s'appelait un ‘Cinéramondex’. Il était commercialisé avec un Projex Junior dont des modèles 110 V, 220 V et bi-tension ont existé.

Dans tous les cas, pour projeter une carte, on devait la retourner deux fois par rapport à son positionnement normal en stéréoscope : tête en bas d'une part ; côté écritures tourné vers la source de lumière d'autre part. Sans ce second retournement, vous projetiez avec inversion horizontale. ROMO est le seul qui, pour éviter toute erreur à la projection, a ajouté au dos de ses cartes destinées aux écoles l'indication ‘File d'images à projeter’, ainsi qu'une deuxième flèche avec la précision ‘Côté à introduire dans le Projecteur’. Mais cela en oubliant d'y ajouter ‘...vu de devant’.

ET AUJOURD'HUI...

      Aujourd'hui, on ne retrouve plus que les productions LESTRADE, commercialisées après 1995 (?) par la Société MSM - 17 rue Sabathe - 65500 - Vic en Bigorre (Hautes Pyrénées, France) - tél. +33 (0)5 62 31 68 01 - fax +33 (0)5 62 31 68 08 ; mais cette société n'a jamais rendu public de nouveau catalogue sous son propre nom. Seuls les sites touristiques assez fréquentés ou qui répondent à la définition d' ‘Exclusivité’ continuent à faire l'objet d'éditions et à être approvisionnés : kiosques en bordure de lacs très connus, châteaux, grottes, Futuroscope (trois cartes non cataloguées car déjà productions MSM...). Les commandes de 10 cartes minimum semblent acceptées par MSM, mais cette société ne dispose plus de toutes les références des catalogues : en 1995, elle remplacait les cartes à référence manquantes par d'autres présentes dans son stock. Les collectionneurs de cartes stéréoscopiques se retrouvent plutôt dans les brocantes photographiques, en particulier Bièvres (premier Week-End de juin) ou Aulnay en Saintonge (premier dimanche de février), où beaucoup de membres du SCF se rendent d'ailleurs, pour compléter leurs collections en LESTRADE, COLORELIEF, BRUGUIERE et ROMO, mais aussi en d'autres matériels stéréo.
      Pour plus de détails sur les listes des cartes stéréoscopiques produites par les principaux producteurs évoquées, nous vous invitons à vous rendre sur les pages “ LESTRADE - Aide aux Collectionneurs ” de ce site.

Dernière info : il existe un adaptateur pour faire passer dans les simplex Lestrade les cartes des marques Colorelief et Bruguière. (cliquez ici)

Cliquer sur les images pour les voir en pleine définition.

  

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Ce texte a été établi par Serge Gauthier, Collectionneur, mais aussi Auteur Auto-Edité de l'ouvrage : "Traité et méthodes modernes de stéréoscopie", ISBN 2-9504593-0-7, © Vandoeuvre 1990-91, © Laneuveville-devant-Nancy 1992. Grand Prix Louis Philippe Clerc 1993 (prix technique délivré par le Musée Français de la Photographie, Bièvres, France). Publié en auto-édition et diffusé par l’auteur : < stereo_serge_gauthier@hotmail.com >. son ouvrage présente : en 1ère partie une analyse de la géométrie de l’observation et de la prise de vues stéréoscopiques, et où sont démontrées sans aucun empirisme les lois qui en découlent ; en 2ème partie des méthodes avec mode opératoire des calculs des graduations à établir une fois pour toutes en fonction de critères souhaités . Seule l’étude de la 1ère partie demande des bonnes bases scientifiques et beaucoup de persévérance. La 4ème édition, augmentée, est en cours de préparation.